Je cours.
Je traverse encore une fois de longs parcours.
Je regarde derrière moi,
les assassins sont sur mes pas, à ce que je vois.
La distance rapetisse,
et armes et filets,
qui râpent et tissent,
m’arracheront des larmes sur milles laies;
plus de délais.
Tout commença hier,
quand le temps m’envoya un message cruel
sur mon immense répondeur
de ma conscience :
il allait rassembler ses soldats fiers;
soit chaque seconde fidèle,
chaque minute de terreur,
et surtout chaque heure de violence,
pour m’achever.
Je ne cesse de courir.
Cette pause de la Vie va me coûter cher.
Il fallait que je puisse y recourir.
Mais j’ai misé trop haut aux enchères.
Je n’avais pas les moyens mais…il le fallait.
Je ne savais ou j’allais,
tant pis pour mon esprit un peu follet.
Et maintenant, petite étourdie essoufflée, où vas-tu sur ce chemin tonnant
de sons survenants?
Plus je m’éloigne d’Eux,
plus je m’approche d’un lieu hasardeux.
–I–
Qu’est-ce que… .Oh, ces miroirs! Damnés miroirs!
Plus durs et intimidants ils sont que d’un morse les roharts;
leur force est telle ! Ce qu’ils me font voir
deviennent tortures sous mes yeux qui ne font qu’y croire!
Impitoyables bourreaux,
de leur invisible faux ils m’accablent!
Ces miroirs tels des démons reflètent mon enfer;
mes yeux se brûlent à s’accrocher sur mon âme nue et fagotée…
Il n’y a pas d’espoir dans le regard de ces miroirs,
il est trop tard.
Reprenant le souffle d’un mal,
je repars au rythme animal
sur des centaines de bouts de moi épars.
—II–
Je suis à présent tombée,
après une folle course, au milieu de duels entre ma conscience et…ma conscience?
Que diable cette absurdité?!
Je me mets entre celles
qui se déchirent en parcelles,
et…oh…mon âme qui chancelle
s’écoule entre elles.
Spectacle d’un triste sort,
comme un sar qui sort
de son eau par hasard, perdant le peu de vie qui lui reste,
dont la mort semble manifeste.
Perdrais-je mon combat?
Je ne sais pas, je me bats;
c’est ce que je sais
et ce que je fais ,
c’est de multiplier les luttes au front bas,
avec émoi,
contre des infects contaminés d’erreurs.
C’est pourtant une bataille que je ne puis supporter
Car qui peut gagner contre des virus de l’horreur?
Bref, je ne suis plus enduite de volonté
je ferais mieux de m’en aller.
—III-
Encore une longue route qui m’amène à un désert,
Où , évidemment, je me perds.
Plus de repères,
vive la misère.
Marchant à l’esprit ignorant
sur le sable brûlant,
ma tête vide
veut s’abreuver de vérité et cherche un guide.
Et toutes ces épreuves, j’ai beau penser que je les mérite,
mais la patience, locataire, s’irrite.
Et là, quand je vois la tempête de Peur qui s’approche,
je regarde cette patience-là qui fait ses bagages
qui insulte , et qui partout sur son passage crache!
Finalement je me cache derrière une grande roche
Mais cela sert à rien, elle s’arrache
Donc le vent me prend et me fais tourner à la vitesse incompréhensible…
Comprenez que je ne subis pas qu’un simple mal de tête,
mais tout un mal d’être.
Des accidents surviennent sur les bords de mon esprit ,
Je me fais vilipender à coups de mots,
Ma force se déchire ,
mon territoire tremble et des fissures
apparaissent et défigurent
la voix qui donne présence
à la sorte de conscience
qui tient mes oreilles en laisse.
J’ai le mal qui blesse.
-IV-
Avançant abattue sur mon chemin,
mon regard trouve près de moi un grand trou sans fin
C’est un puit sans fond qui avale la vie, rien de moins.
En suis-je vraiment rendue à ce point?
Doucement ma curiosité me mène à mieux regarder,
et couchée sur le sentier,
je tends vers l’abîme mes mains.
Dégoûtante fascination.
Mes bras semblent vouloir être aspirés;
ils deviennent flous
et par l’aimant gouffre sont attirés…
C’est fou.
Je les retire, ce trou me rebute.
Non merci à l évasion immortelle ,
Cul-de-sac de noirceur éternelle.
—V—
Plus loin, mes yeux fixent d’interrogations des petites bêtes couleurs de suie.
Et je comprends que je ne cesse de créer des malédictions dans mon univers désespéré.
Puis sans surprise le destin fait nuit.
Mes pas se font muets dans une obscurité inespérée,
Mais je ne peux pas vraiment crier.
Le corps est libre, mais l’esprit, prisonnier.
Prisonnier d’une vie libérée de désirs,
Prisonnier de mon infidélité à me ressaisir
un autre jour, une autre fois. Je trompe la réalité.
Mes sentiments se font la guerre,
Et fondent le monde où je suis.
C’est ma faute.
Puis le cœur en sommeil je tâte les souvenirs, les cauchemars et d’autres rêves.
Et j’en ôte.
—VI-
La nuit enfin morte, je me réveille dans une jungle quelconque, étendue sur des fleurs sauvages.
Bien sauvages parce qu’elles m’effleurent de chagrin intense
Et me mettent au nez l’odeur d’une fragile résistance.
Je suis ivre de malaises et je me vomis. Des symptômes se propagent;
On dirait bien qu’une maladie me prend comme otage.
Maudites fleurs.
Le ciel fait pleuvoir, à mon étonnement, quelques pages ici et là de mon journal d’existence.
Des images animées et colorées d’incertitudes tombent des nuages,
Ce sont les petits fragments de mon pauvre présent, qui ne sont, hélas, pas très sages
Je les abandonnent puisque je n’en suis pas fière
Ce ne sont que des brouillons, de toute façon je vais les refaire
Je suis une artiste qui effacera les défauts …
Seulement, j’attends les meilleurs pinceaux…
Mais que perçois-je à l’horizon?
Pas encore elle, cette nuisible persécutrice hautaine
Qui absorbe toute ma vitalité, cette vilaine!
Je n’hésite pas à lui annoncer ce discours de raison :
« Exigence, ma reine
Peux-tu avoir pitié de ta servante?
Je commence à m’étouffer de haine
Oui, pour toi, pour moi, pour nous!
Ce sont des malédictions que tu inventes
Ne les vois-tu donc pas, partout et pour tout?
Il me faut déguerpir du quotidien intraitable
Et toi, très chère, tu participes avec lui au concert exécrable
Dédié à moi. Sale musique empoisonnée, tu me jettes à terre!
Voici mes cris, ma reine, ne les entends-tu pas? Mais non, tu les enterres! »
Cervelle émoussée, cœur ébranlé, pieds figés
Statue d’amertume, je suis devenue
La culpabilité s’est érigée.
Où est l’invisible avenue?
—VII—
Je rampe au ralenti, toujours sur mon continent criminel, dans des insignifiantes ruelles.
Chaque mouvement est un tracas qui m’assombrit
Et j’aimerais pouvoir me dévêtir de tant de soucis
Qui habillent ma joie , qui la coupe en rouelles.
Les difficultés sont si faciles à obtenir.
—VIII-
Je suis épuisée,
J’en ai assez d’être la risée.
je n’ai plus d’énergie à puiser;
J’en ai assez de mon âme infiniment brisée.
C’est sans arrêt la même chanson;
La même mélodie de frayeur.
Pis là j’entends encore le chanteur.
Bon, je m’en fous de ses refrains,
Moi, je veux me perdre dans les ailleurs
par la fuite, qui est ma porte de sortie d’urgence
pour m’éloigner de cette Vie possédée
du démon, de démons de mondes codés.
Tout ce que j’ai traversé sont des réels malheurs,
Donc je me suis trompé de chemin.
Je dois retrouver la Vie pausée , je m’y envoie
Par contre, cette fois-ci, je fuirai dans la bonne voie,
et non plus vers le Boulevard Des Tourmentes,
comme cela a été le cas jusqu’à maintenant.
—IX–
Je suis en ce moment à ma destination tant voulue.
Enfin aux Ailleurs!
Aux paysages des Lointains, ce sont les arbres de paix qui ornent ma vue.
Et c’est leurs silences
qui vont finalement taire mes souffrances.
Ah!
Un sourire grandit sur mon visage un peu trop grisé depuis la première fuite;
Car j’observe là-bas l’Élégante sensibilité et La Demoiselle intelligence qui me saluent.
Domestiquées, apprivoisées, elles ne font pas de mal à une mouche!
C’est sûr, elles ont même reconstruit mon visage qui était légèrement…
Dévasté.
Oh, elles courent en ma direction!
C’est le temps d’aller jouer dans les hautes sphères des champs!
Qu’on se retrouve, simplement.
Alors, je vous dis,
je me dis,
de retour après ma Pause…