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Reflets

C’est une nuit bleutée pour les papillons du ventre. L’heure sombre déroulée comme un tapis   établissait le saule chasseur ; autrement dit, moi.  L’eau fondait à la noirceur et masquait ses souterrains glorieux, et moi je masquais mes feuillages malheureux.  Je me regarde à son miroir, puis je me garde de revoir. Pourquoi m’acharner à saisir mon regard que je ne vois pas depuis des années ? Pourquoi rêver de mon image alors qu’elle n’est emportée que par le vent ?

Vais-je rester linceul pour le reste de ma vie ? Dans la grande caresse des sons carillons, suis-je une princesse en attente ? Je suis un saule chasseur, pas pleureur. Je préfère laisser noyer ces questions au bord de l’eau.

Je contourne rapidement mes lignages des profondeurs étendus sur l’eau, jusqu’à ce que je vois. Un scintillement niché au coin de mon ombre reflet.  Je scrute le point lumineux qui s’était incrusté en cette voleuse nuit. Que se passe-t-il ? Ce bout de reflet est-il vraiment à moi ? Soudain, d’autres pixels d’eau se mirent à briller, tous en chœur. La lumière vivait, la lumière était moi. Mes feuilles, mon tronc, mon âme. J’étais là, créature flottante sur les eaux glorieuses.

J’ai compris. La lune s’était présentée pour me représenter. La noire nuit foulait ma vie donc je l’avais toujours évitée. Mais la lune ne m’avait jamais oublié. Depuis combien de temps faisait-elle ce manège ? Combien de temps s’acharnait-elle à me ressaisir, me réveiller de mes égards mortels ?

Reflets. Je ne serai pas oublié, et je n’oublierai plus. À l’aube de moi-même, le ventre en papillon, le bleu pastel en forme de nuit, je sais.

Points

Point de non-retour, point de départ, points d’inaptitude, points d’interrogation, points de rupture, points noirs. Une rafale de coups de points en un seul dessin. Accablée par le pays de son âge, elle trace son identité au fil de son efface, avec l’arbre d’en face. Le crayon porte-parole ne contourne toutefois la faiblesse de sa main droite. L‘oeil en colère observe encore, mais tolère peu le manque de gestes sages de la dessinatrice. Le paysage qu’elle contrôle est faible. Elle plonge dans le ciel et s’entête, ses pieds envolés dans la rivière.

 

Elle veut être une artiste mais c’est encore trop nouveau, ce qui est à découvrir avec son crayon à mine.

Une sensation forte de pouvoir tout faire, de tout voir même à l’envers, c’est ce qu’un croyant amène.

C’est beau mais lourd à porter, parce que l’humain ne transporte qu’une infirme partie de la raison.

Mais c’est ce qu’elle ressent, et elle tente donc de reproduire sa vision, dans sa partie du monde.

Cependant, les lignes de travers et les ombres défoncées lui montrent le simple réel,

Entre les questions et les réponses il n’y a qu’un pas mais elle ne le franchit jamais.

Entreprendre cette compréhension fait franchement mal à son maintenant.

Ca y est, ça recommence, les souvenirs et les avenirs lui agressent les yeux,

elle se reconnaît floue à distance. Comment pourrait-elle de son trône arracher Dieu pour qu’il lui dise en face comment faire marcher sa vie, qui est pour l’instant immobilisée par son instabilité.

 

 

Au parc, sa main s’agite sempiternellement. Dessine, dessine. Des cimes, des bas. Décime. Les feuilles suivent leur cours , la rivière tombe son bruit. Des gouttelettes surgissent sur la peau des eaux. La nature fait son travail, l’immature aussi.La beauté sauvage frappe encore, et les phrases médiocres la frappent au corps. Un cycle sans fin, dans les deux cas où la violence fait rage. Maintenant, elle gronde parce que l’orage s’incruste dans le dessin vivant, et qu’elle doit le laisser faire son œuvre. Elle regarde son papier devenu humide,comme si elle avait pleuré tous les regrets qui piquaient ses pupilles.

 

 

Point de non-retour, point de départ, points d’inaptitude, points d’interrogation, points de rupture, points noirs. Ils crient toujours présents, après plusieurs heures, au fil des ans, après avoir manipulé le temps de ses mains pour fabriquer une image qui se veut fidèle au paysage, après avoir cherché du temps à manipuler pour fabriquer son image qui se veut fidèle à son visage tant imaginé.

Mais c’est raté. Elle n’est pas douée, son papier, elle veut le déchirer. Jusqu’à ce que le vent l’emporte, si ce n’est pas le diable, qui le conduit plus haut que les nuages tourmentés.

Ville de minuit

Laissez la place à la ville de minuit. Ville demi-jour, demi-nuit, on y entend des pas de cris au milieu de la nuit, cette musique de ville. Les lumières tombent, les masques tombent, ils retournent dans leurs tombes. Le jeune homme foule le trottoir comme il foule un tapis rouge. Il subit un poids lourd , avec tous ces flashs des lampadaires,des étoiles, ces milliers de paparazzis qui courent après lui. Elle aussi. La solitude est belle, elle ne tombe jamais de sommeil. Ouverts, les yeux vermeils sont prêts à traverser les frontières, retrouver des portes de sorties au fil de la promenade. Jusqu’à ce qu’il croise, celle, elle, aux cheveux sombres, aux courbes de bombes, pures merveilles. Ombre de minuit sensuelle, il voulut l’étreindre. Mais ce n’était qu’une illusion, une illusion, elle est pas là, elle est disparue, il est trop minuit, il est trop tard. Elle aussi. Elle éperdue à l’autre bout de la ville, ayant croisé le regard de l’homme aux yeux brillants. À peine tournée au coin d’une rue, il n’était plus là, il n’avait jamais été là.

Il pleut, il est plus de minuit. Le jeune homme glisse ses rêves dans une poche et maudit la nuit, la ville de minuit, la ville qui le nargue avec tous ses fantasmes. La fille lâche que trois larmes dans la pluie , fait écrouler ses pieds dans une flaque d’eau. Elle est quand même tombée en amour avec la ville de minuit, même si les passants la repoussaient, même si elle les repoussait. Ce sont les ombres qui l’intéressent. Passent les heures, l’homme rentre chez lui pour rentrer dans ses rêves. Elle , elle réchauffe le temps en dansant dans la rue obscure et silencieuse. Cependant, elle ne sait pas, mais elle crée des ombres sans s’en rendre compte; elle est même l’ombre désirée du gars qui la regardait de loin, sur un autre coin de rue, sur un autre boulevard, les yeux perdus sur son image.

Je cours.

Je traverse encore  une fois de longs  parcours.

Je regarde derrière moi,

les assassins sont sur mes pas, à  ce que je vois.

La distance  rapetisse,

et armes et filets,

qui râpent et tissent,

m’arracheront des larmes sur milles laies;

plus de délais.

Tout commença hier,

quand le temps  m’envoya un message cruel

sur mon immense répondeur

de ma  conscience :

il allait rassembler  ses soldats fiers;

soit chaque seconde fidèle,

chaque minute de terreur,

et surtout chaque heure de violence,

pour m’achever.

Je ne cesse de courir.

 

Cette pause de la Vie  va me coûter cher.

Il fallait que je puisse y recourir.

Mais j’ai misé trop haut aux enchères.

Je n’avais pas les moyens mais…il le fallait.

Je ne savais ou j’allais,

tant pis pour mon esprit un peu follet.

Et maintenant, petite  étourdie essoufflée, où vas-tu sur ce chemin tonnant

de sons survenants?

Plus je m’éloigne d’Eux,

plus je m’approche d’un lieu hasardeux.

–I–

Qu’est-ce que… .Oh, ces miroirs! Damnés miroirs!

Plus durs et intimidants ils sont que d’un morse les roharts;

leur force est telle ! Ce qu’ils me font  voir

deviennent tortures sous mes yeux qui ne font qu’y croire!

Impitoyables  bourreaux,

de leur invisible faux ils m’accablent!

Ces miroirs tels des démons reflètent mon enfer;

mes yeux se brûlent à s’accrocher sur mon âme nue et fagotée…

Il n’y a pas d’espoir dans  le regard  de ces miroirs,

il  est trop tard.

Reprenant le souffle d’un mal,

je repars  au rythme animal

sur des centaines de bouts de moi  épars.

 

 

 

—II–

Je suis à présent  tombée,

après  une folle course,  au milieu de duels entre ma conscience et…ma conscience?

Que diable cette absurdité?!

Je  me mets entre celles

qui se déchirent en parcelles,

et…oh…mon âme qui chancelle

s’écoule entre elles.

Spectacle d’un triste sort,

comme un sar qui sort

de son eau par hasard, perdant le peu de vie qui lui reste,

dont la mort semble manifeste.

Perdrais-je mon combat?

Je ne sais pas, je me bats;

c’est ce que je sais

et ce que je fais ,

c’est de multiplier les luttes au front bas,

avec émoi,

contre des infects contaminés d’erreurs.

C’est pourtant une bataille que je ne puis supporter

Car qui peut gagner contre des virus de l’horreur?

Bref,  je ne suis plus enduite de volonté

je ferais mieux de m’en aller.

 

 

—III-

Encore une longue route qui m’amène à un désert,

Où , évidemment, je me perds.

Plus de repères,

vive la misère.

Marchant à l’esprit ignorant

sur le sable brûlant,

ma tête vide

veut s’abreuver de vérité et cherche un guide.

Et toutes ces épreuves, j’ai beau penser que je les mérite,

mais la patience, locataire, s’irrite.

Et là, quand je vois la tempête de Peur qui s’approche,

je  regarde cette patience-là  qui fait ses bagages

 

qui insulte , et qui  partout sur son passage crache!

Finalement je me cache derrière une grande roche

Mais cela sert à rien, elle s’arrache

Donc le vent me prend  et me fais tourner à la vitesse incompréhensible…

Comprenez que je  ne subis pas qu’un  simple mal de tête,

mais  tout un mal d’être.

 

 

Des accidents  surviennent sur  les bords  de mon esprit ,

Je  me fais vilipender à coups de mots,

Ma force se déchire ,

mon territoire tremble  et des fissures

apparaissent  et défigurent

la voix qui donne présence

à la sorte de conscience

qui tient mes oreilles en laisse.

J’ai le mal qui blesse.

 

-IV-

Avançant abattue sur mon chemin,

mon regard trouve près de moi un grand trou sans fin

C’est un puit sans fond  qui avale la vie, rien de moins.

En suis-je vraiment  rendue à ce point?

Doucement ma curiosité me mène à mieux regarder,

et couchée sur le sentier,

je tends vers  l’abîme  mes mains.

Dégoûtante fascination.

Mes bras semblent  vouloir être aspirés;

ils deviennent flous

et par  l’aimant gouffre sont attirés…

C’est fou.

Je les retire, ce trou me rebute.

 

Non merci à l évasion immortelle ,

Cul-de-sac de noirceur éternelle.

 

 

—V—

Plus loin, mes yeux  fixent d’interrogations des petites bêtes couleurs de suie.

Et je comprends que  je ne cesse de créer des malédictions dans mon univers désespéré.

Puis  sans surprise le destin fait nuit.

Mes pas  se font muets dans une obscurité inespérée,

Mais je ne peux pas vraiment crier.

Le corps est libre, mais l’esprit, prisonnier.

Prisonnier d’une vie libérée de désirs,

Prisonnier de mon infidélité à me ressaisir

un autre jour, une autre fois. Je trompe la réalité.

 

Mes sentiments se font la guerre,

Et fondent le monde où je suis.

C’est ma faute.

Puis le cœur en sommeil je tâte les souvenirs, les cauchemars et d’autres rêves.

Et  j’en ôte.

 

 

 

 

—VI-

 

La nuit enfin morte,  je me réveille dans une jungle quelconque,  étendue sur des fleurs sauvages.

Bien sauvages parce qu’elles m’effleurent de chagrin intense

Et me mettent au nez l’odeur d’une fragile résistance.

Je suis ivre de malaises et je me vomis.  Des symptômes se propagent;

On dirait bien qu’une maladie me prend  comme otage.

Maudites fleurs.

 

Le ciel  fait pleuvoir, à mon étonnement, quelques pages ici et là de mon journal d’existence.

Des images animées et colorées d’incertitudes tombent des nuages,

Ce sont les petits fragments de mon  pauvre présent, qui  ne sont, hélas, pas très sages

Je les abandonnent  puisque je n’en suis pas fière

Ce ne sont que des brouillons,  de toute façon je vais les refaire

Je suis une artiste qui  effacera les défauts …

Seulement, j’attends les meilleurs pinceaux…

 

 

 

 

 

 

 

Mais que perçois-je à l’horizon?

Pas encore elle,  cette nuisible persécutrice hautaine

Qui absorbe toute ma vitalité, cette vilaine!

Je n’hésite pas à lui annoncer ce discours de raison :

« Exigence, ma reine

Peux-tu  avoir pitié de ta servante?

Je commence à m’étouffer de haine

Oui,  pour toi, pour moi, pour nous!

Ce sont des malédictions que tu inventes

Ne les vois-tu donc pas, partout et pour tout?

Il me faut déguerpir du quotidien intraitable

Et toi, très chère, tu participes avec lui au concert exécrable

Dédié à moi. Sale musique empoisonnée, tu me jettes à terre!

Voici mes cris, ma reine, ne les entends-tu pas? Mais non, tu les enterres! »

Cervelle émoussée, cœur ébranlé,  pieds figés

Statue d’amertume, je suis devenue

La culpabilité  s’est érigée.

Où est l’invisible avenue?

 

 

 

—VII—

Je rampe au ralenti, toujours sur mon continent criminel,  dans des insignifiantes ruelles.

Chaque mouvement  est un tracas qui m’assombrit

Et j’aimerais pouvoir  me dévêtir de tant de soucis

Qui habillent  ma joie , qui la coupe en rouelles.

Les difficultés sont si faciles à obtenir.

 

—VIII-

Je suis épuisée,

J’en ai assez d’être la risée.

je n’ai plus d’énergie à puiser;

J’en ai assez de  mon âme infiniment brisée.

 

 

C’est sans arrêt la même chanson;

La même mélodie de frayeur.

Pis  là j’entends encore le chanteur.

Bon, je m’en fous de ses refrains,

Moi, je veux me perdre dans les ailleurs

par la fuite, qui est ma porte de  sortie d’urgence

pour  m’éloigner de cette Vie possédée

du démon,  de démons de mondes codés.

Tout ce que j’ai traversé sont des réels malheurs,

Donc je me suis trompé de chemin.

 

Je dois retrouver la Vie pausée , je m’y envoie

Par contre, cette fois-ci, je fuirai  dans la bonne voie,

et non plus  vers le Boulevard Des Tourmentes,

comme cela a été le cas jusqu’à maintenant.

 

 

 

 

—IX–

 

 

Je suis en ce moment à ma destination tant voulue.

Enfin aux Ailleurs!

Aux paysages des Lointains, ce sont les  arbres de paix  qui   ornent ma vue.

Et c’est leurs silences

qui vont finalement taire mes souffrances.

Ah!

Un sourire grandit sur mon visage un peu trop grisé depuis la première fuite;

Car j’observe là-bas l’Élégante sensibilité  et La Demoiselle intelligence  qui me saluent.

Domestiquées, apprivoisées, elles ne font pas de mal à une mouche!

C’est sûr, elles ont même reconstruit mon visage qui était légèrement…

Dévasté.

Oh, elles courent  en ma direction!

C’est le temps d’aller jouer dans les hautes sphères des champs!

Qu’on se retrouve, simplement.

Alors, je vous dis,

je me dis,

de retour après ma Pause…